Conduite du changement : 100% des échecs sont des essais, 100% des succès aussi !
Quand on ne fait rien, il ne se passe rien ! L’absence d’échec est un symptôme de sclérose d’une organisation : rien ne change, rien ne bouge… et pourtant les concurrents attaquent, les clients ont de nouvelles exigences de produits / services, les collaborateurs ont de nouvelles aspirations et de nouveaux comportements,… Hélène, manager promise à un bel avenir, sort effondrée du bureau de son manager. Elle vient d’apprendre qu’elle n’obtiendra pas le poste dont elle rêvait : chef du projet « Customer Inside » pour remettre le client au coeur des processus de sa direction, un des projets stratégiques suivis par la DG. Raison invoquée ? Elle a essayé de développer cette approche dans son équipe et ça n’a pas fonctionné :
- sur une équipe de 15 personnes, 2 collaborateurs (plus de 10% !!!) se sont plaint à la DRH parce que le changement était un nouveau facteur de stress insupportable,
- un des managers qu’Hélène avait sollicités pour faire évoluer les processus sur leur activité a fait savoir qu’il n’appréciait pas du tout qu’on remette en cause une organisation qui fonctionne très bien.
Devant ce tollé (!), son directeur l’a pressée de mettre un terme à son expérimentation. Pour le projet « Customer Inside », on lui a préféré une personne plus expérimentée, qui connaissait personnellement la plupart des managers de la société et qui n’avait pas la moindre casserole à son actif ! Le projet a failli mourir rapidement. Le chef de projet connaissait certes bien les acteurs internes… mais assez peu les clients. Il avait l’expérience de projets dans des fonctions centrales, mais jamais avec une dimension aussi transverse et avec un tel impact sur les opérations. Bref, c’était un bon manager gestionnaire, mais il était clairement sorti de sa zone de confort ! Au lieu de chercher à créer le sentiment d’urgence en s’appuyant sur son DG, il a essayé de rassurer tout le monde en expliquant que son projet n’allait pas révolutionner les choses. Le DG ayant eu vent de ce qui se disait a décidé de reprendre les choses en mains, en accordant un double droit à l’erreur :
- il a laissé le manager à la tête du projet,
- il lui a adjoint les services d’Hélène qu’il a nommée responsable de la conduite du changement.
Le projet est aujourd’hui terminé et toutes les équipes ont fait profondément évoluer leurs modes de fonctionnement pour mettre le client au coeur de leur activité, de la R&D à la direction commerciale. Cette histoire fait sourire et pourtant elle est vraie et récente… En France, la tradition veut malheureusement qu’un échec se traduise assez rapidement par une mise au placard. Comme si nous étions aveuglé par le résultat décevant, ce qui nous empêche de voir les pépites qui se cachent derrière cet échec. Un échec, c’est d’abord une tentative de faire bouger les choses. Il est donc source de plusieurs bonnes nouvelles : il existe des leviers d’amélioration, puisque certaines personnes ont envie de changement, il y a des acteurs qui ont le courage d’entreprendre. Ces personnes ont expérimenté des voies, qui n’ont pas marché cette fois, mais ils peuvent en tirer un retour d’expérience souvent enrichissant, y compris pour les équipes qui les entourent. Lorsqu’un client me demande de l’aider à choisir une personne à un poste de manager, notamment sur une fonction exposée, l’échec est pour moi un des critères importants de choix, sous réserve bien entendu que ladite personne en ait tiré des enseignements. Il prouve que la personne :
- sait prendre des risques,
- est un moteur de changement,
- a du recul sur son activité,
- a appris plus de choses sur les comportements et les organisations que ceux qui ne bougent pas.
Pas si mal pour un échec ! Certains vont même jusqu’à imposer l’échec à leurs équipes, comme le patron de PBS Digital. Il n’est pas nécessaire d’en arriver là. Commençons par valoriser les échecs de ceux qui essaient d’insuffler le changement. 100% des échecs sont des essais, 100% des succès aussi !